mais moi, je lis … 😉
On pense parfois que l’esthétique est une construction humaine et qu’il faut nécessairement l’intervention, toujours heureuse, de la main de l’homme pour rendre une chose ou un être quel qu’il soit digne d’être regardé. Arrogance, manque de lucidité, détachement ou un peu de tout ça à la fois ? Rien d’immuable heureusement !
En réalité, cette esthétique est présente partout autour de nous, mille fois réinventée par la nature qui nous environne. C’est par contre bel et bien notre oeil humain, trop formaté, trop pressé, trop éteint … qui ne parvient pas à la révéler, reléguant cette nature spontanée au rang du désordre sans intérêt. Autant de no man’s land forcément laids et même quelques fois affolants !
Mais à quoi bon s’échiner à créer de la beauté, souvent bien relative et vite démodée, lorsque, dans le même temps, l’intensification de nos impacts détruit la beauté de la nature que nous n’avions pas encore pris le temps de découvrir ?
La tulipe sauvage (Tulipa sylvestris) est certainement une de ces espèces capables de nous réconcilier avec la vie sauvage, de nous ouvrir les yeux sur sa beauté délicate, éphémère mais aussi dynamique et à l’incroyable potentiel de régénération. Un spectacle véritablement apaisant et réjouissant lorsque l’on se donne le temps d’y assister. Lorsque l’on décide aussi de ne pas repeindre en permanence les murs de la salle où se tient cette représentation car c’est dans les murs lézardés à la peinture écaillée que la timidité du sauvage s’estompe et que les espèces prennent place sur la scène.
Pour en revenir à notre fameuse tulipe indigène, elle n’est plus guère présente à l’état naturel en Belgique que dans un recoin hennuyer.
En France, c’est dans quelques cultures de vigne particulièrement extensives et gérées naturellement que l’on retrouve encore la belle fleur jaune élégante, parfois avec des densités incroyables. Vigne et tulipe sauvage y forment un duo éclatant au profit d’un paysage unique et harmonieux.
Typique des vieux vergers, des parcs mais aussi des friches agricoles, elle a très fortement régressé partout en Europe au point de faire l’objet de multiples plans de sauvegarde. Et pendant ce temps, dans nos jardins, on n’a jamais dépensé autant d’argent pour réaliser des plantations toujours plus artificielles et exubérantes.
Pourtant, la page de la tulipe sauvage n’est pas définitivement écrite chez nous. On pourrait tout aussi bien renier les innombrables variétés et formes horticoles et planter cette espèce indigène dans nos jardins aussi ! A quand un « Keukenhof » sauvage et indigène ?
Plus largement, à l’heure du renouveau de la vigne et à la recherche d’une différenciation en phase avec l’environnement, quel sera le premier vignoble belge qui décidera de réhabiliter cette espèce au cœur de sa vigne par la plantation massive et la valorisation de paysages à la fois naturels et productifs ? Si ce vignoble existe, je suis à sa disposition pour bâtir cette action riche de sens et promise à la beauté.
Pourquoi pas au Clô Franciscus ?
Voilà une belle perche que je saisis sans attendre ! Je te reviens très vite François !