Les événements tragiques de cette mi-juillet 2021 suscitent déjà de nombreux débats. La faute à qui ? Les changements climatiques sont-ils responsables de ces conditions météorologiques extrêmes ou est-ce simplement lié à la défaite des diables rouges ? Pouvait-on mieux s’y préparer ? Moi, j’ai simplement envie de pointer la vulnérabilité de notre société dans un tel événement. Je vous livre ici quelques considérations écologiques depuis le bord des flots, déchaînés d’abord mais très vite revenus à la normale.
Plus de respect pour les rivières
On entend dans les multiples interviews que la faute incomberait à un entretien déficient des cours d’eau. Je reconnais qu’un nettoyage des rivières reste bien nécessaire tant les déchets y sont encore tellement nombreux malgré plusieurs décennies de mobilisation citoyenne lors des opérations « Rivières propres ». Mais ce n’est pas de ça qu’il s’agit ici. Dans le viseur, on retrouve les quelques malheureux arbres un peu trop grands, pas assez vivants ou même complètement morts qui sont présents le long des cours d’eau. Les fameuses embâcles, déjà formées ou en puissance, devraient être, selon certains, encore davantage traquées . En fait n’importe quel tronc d’une taille suffisante peut alors devenir suspect et sera zigouillé au moindre signe de faiblesse. C’est déjà un peu la gestion actuelle opérée sur certaines rivières. Mon propos n’est pas de sanctuariser le moindre arbre rivulaire ou tas de branche amassé sur une berge mais je veux rappeler que ce sont ces micro-habitats qui génèrent la vie dans la rivière, une vie déjà bien malmenée que nous nous devons de prendre en compte. Atténuer les impacts de ces événements extrêmes ne passe pas par ce « nettoyage » des rivières mais bien par la recréation d’espaces de liberté temporairement envahis par l’eau tout au long de nos cours d’eau. Le lit majeur n’est pas qu’une vague notion théorique du cours de géo, c’est l’espace où une rivière déborde et sinue dans son évolution naturelle et dynamique. Par un vaste plan de « désimperméabilisation » de nos territoires, on doit agir . Dans les champs, les jardins, les parcs, au milieu des villes aussi : on doit redévelopper les capacités d’infiltration que l’on s’est évertué un peu partout à supprimer. Certains voudraient accélérer et fluidifier l’écoulement dans les cours d’eau, il faudrait au contraire ralentir et infiltrer ce flux.
Quel impact ces inondations auront sur la dispersion des espèces exotiques envahissantes comme la renouée du Japon dont les tiges en plein développement ont été charriés par les flots tout au long des vallées ? Voilà une considération anecdotique voire déplacée pensez-vous ? La priorité est au soutien des sinistrés et au réconfort des familles endeuillées bien entendu. Mais à l’heure des bilans, il faudra bien prendre ce type d’impact en compte. Car en écologie comme en hydrologie, tout est lié. Les espèces invasives banalisent les écosystèmes, notamment rivulaires et diminuent leur capacité de résilience, y compris pour retenir l’eau ou les sols ou encore pour régénérer des berges naturelles après une perturbation aussi majeure soit-elle. Nous avons donc besoin d’écosystèmes naturels qui fonctionnent au mieux pour nous aider à nous protéger des inondations.
La faute à qui ?
Rien ne sert d’en vouloir à la nature car ça ne sert à rien (!) et que, par ailleurs, ce qui se passe n’est que la conséquence des choix humains, des choix posés localement ou globalement. Au niveau global, l’augmentation des gaz à effets de serre, dont les actions locales ont leur part, induit les bouleversements climatiques que nous expérimentons actuellement et notamment des pluviosités hors normes. Mais localement aussi, l’urbanisation, l’agriculture et la sylviculture intensives diminuent drastiquement les capacités d’absorption décuplant en surface les volumes d’eau et les vitesses d’écoulement. Aujourd’hui encore, on continue de réduire l’espace de liberté laissé aux rivières tout en poursuivant le drainage des zones humides.
Une nature qui paie d’ailleurs également un lourd tribut lors de tels épisodes. Qui pour dénombrer les nichées de martin-pêcheur, de bergeronnette des ruisseaux ou d’hirondelle de rivage ensevelies par les flots ?
Réfléchissons à notre avenir avec la nature
A la manière de la nature, relevons-nous plus forts et plus conscients de notre dépendance intime aux éléments naturels. Deux jours après le pic de crue, l’eau de certains cours d’eau s’écoulait déjà avec un calme et une limpidité déconcertantes. Les blessures humaines prendront plus de temps, profitons-en pour réfléchir à des solutions nature admise.
Notre vulnérabilité est directement proportionnelle à notre arrogance d’humain tout puissant. On peut faire le choix d’écouter davantage la nature pour la laisser nous aider à reprendre quelques forces. Ou déjà se préparer à se lamenter encore un peu plus, à la prochaine crue.
Les images qui suivent ont été réalisées les 15 et 16 juillet 2021 dans la vallée du Burnot (© Michel Fautsch). Il ne s’agit certainement pas d’une des vallées les plus impactées par ces inondations hors normes mais on peut localiser, là aussi, beaucoup de maux du bord de l’eau.
Tout à fait d’accord avec cette analyse !
bonne réflexion Michel, c’est très bien de remettre la balle au centre -:)